Des regards qui créent des murs

En vivant désormais dans un monde virtuel où les informations nous submergent de toutes parts, tant les vraies que les fausses, les sérieuses que les superficielles, ne nous sentons-nous pas envahis d’un sentiment durable que le monde est plus mal en point que jamais?

Il y a bien matière à acquiescer. Regardons juste à côté de chez nous. Comment comprendre qu’un peuple libre, fier et puissant, ait été jusqu’à élire un être caricatural, à la suite d’une campagne d’injures, de faussetés répétées, suscitant haine et violence tournées vers des minorités? N’est-ce pas la plus grande démocratie qui a donné un tel résultat?

Un monde qui fait peur

Le monde dans lequel nous vivons a changé considérablement. Les politiques néolibérales ont permis la fluidité des échanges internationaux et la concurrence souvent déloyale lorsque les salaires de pays en émergence permettent des coûts de production outrageusement bas. L’ouverture des marchés y contribuant, nos usines locales ferment une à une, victimes de la délocalisation au profit d’actionnaires toujours plus avides et amoraux. Les grandes entreprises qui subsistent font la réingénierie de leurs processus, comptant de plus sur les sous-traitants et leurs emplois précaires. L’austérité ajoute une couche à la morosité. Prédire l’appauvrissement progressif de nos classes ouvrière et moyenne est devenu un truisme.

Qui est responsable?

Devant les angoisses que suscitent toutes ces turbulences, les peurs qu’engendre la désespérance, nous sommes là à chercher des coupables. L’Occident, tant chrétien que laïque, pointe l’Islam. La gauche houspille la droite et son capitalisme sauvage. La droite dénigre la gauche et son idéalisme sectaire. L’individualisme gagne le mouvement féministe, ce qui met en rogne les grandes figures des victoires acquises pour l’ensemble. L’émergence d’un courant masculiniste qui dénonce l’oppression féministe s’ajoute au trouble sociétal.

Exclusions et rejets sont monnaie courante, que ce soit au sein de nos milieux naturels ou communautaires, dans nos appartenances citoyennes ou religieuses. De tous les côtés on se lance des anathèmes. Et le mot « déportation » est désormais une tendance chez notre voisin du sud, ce qui n’est pas sans rappeler quelques souvenirs amers de « solutions » infâmes. Rien n’y fait, l’étranger, l’autre, le différent prend le rôle du mauvais objet, du bouc-émissaire.

Les catholiques n’échappent pas à cette vague. Après la polarisation gauche-droite, on voit plus récemment un déchirement entre les « culturels » ou « politiques » qualifiés d’« identitaires » par ceux qui se considèrent plus « spirituels ». Le pape lui-même n’arrive plus à susciter et encore moins à imposer l’unité. Il subit la fronde de ses opposants au grand jour. Mais il demeure fidèle à ses convictions : « Il est vrai que nous connaissons une crise économique, une crise culturelle, une crise de la foi, mais au fond, c’est la personne humaine qui est en danger ». (1)

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