Les migrations des populations en quête d’un monde meilleur constituent un processus irréversible. La prospective migratoire indique que l’avenir est résolument multiethnique et pluri-religieux. Les sociétés autrefois plus homogènes, comme le Québec, en seront profondément transformées. Au cœur de ce phénomène, l’importance accordée par les nouveaux arrivants à leur appartenance religieuse semble susciter plus de résistance dans la société d’accueil, trop souvent envahie par les images troubles que l’actualité lui renvoie. Déjà en 1984, le mouvement des Religions pour la paix remarquait : « Nous sommes réunis à Nairobi comme des hommes et des femmes enracinés dans leurs traditions religieuses respectives […]. Nous reconnaissons avec tristesse que trop souvent, dans des zones de lutte et de conflit, on s’est servi de la religion pour aggraver les divisions et la polarisation. »
UNE CLÉ POUR LA PAIX
En laissant à leurs adeptes « radicalisés » le champ libre pour accomplir ce qu’ils conçoivent comme la loi et la justice divines, les religions peuvent, en effet, consentir à laisser s’enflammer des situations tendues. Et pourtant, une des clés de la paix entre les peuples est à trouver dans les religions elles-mêmes. Pour que le monde ait un avenir, il importe de voir les religions comme des milieux d’appartenance forte qui ont un réel pouvoir d’influer sur le cours de l’histoire. Pour les croyants, en effet, la religion est un facteur déterminant de leur identité. Confrontés à cette posture, certains membres de la communauté d’accueil en viennent eux-mêmes à se tourner de nouveau vers leur propre tradition religieuse, comme un retour aux sources, comme pour se mettre à chercher eux-mêmes qui ils sont, ce qui semble une réaction salutaire.
DIALOGUER POUR VIVRE ENSEMBLE
Depuis Vatican II, l’Église catholique s’est mise à promouvoir la liberté religieuse. Reconnaître la liberté de religion, c’est permettre aux autres religions non seulement d’exister, mais aussi de se développer. Il importe de pouvoir établir avec elles un dialogue authentique sur la base d’un respect mutuel. Ce dialogue se décline en quatre formes distinctes: le dialogue de la vie ; le dialogue des œuvres ; le dialogue des échanges théologiques (surtout entre spécialistes) ; et le dialogue de l’expérience religieuse (partage des richesses spirituelles). Je ne retiendrai ici que les deux premières.
chercher le bien commun
Le dialogue de la vie consiste à établir des relations au quotidien, basées sur le respect de l’autre et de ce qui lui appartient, dans un souci réciproque de sécurité et d’entraide ponctuelle. Lorsque des familles de religions différentes se côtoient dans un même quartier, elles sont appelées à se préoccuper des questions qui touchent au bien commun. Pour que cela fonctionne, une condition essentielle : qu’il y ait véritablement rencontre. La série humoristique La petite mosquée dans la prairie est un exemple troublant de réalisme sur le choc des cultures religieuses. Mais la rencontre peut produire des pousses nouvelles qui ont aussi un vrai pouvoir de rassembler.
réaliser des choses ensemble
La deuxième forme de dialogue est plus complexe. Le dialogue des œuvres consiste à pouvoir réaliser des choses ensemble. Des groupes associés à cette mouvance sont en développement de par le monde. Coexister France, par exemple, est une association reconnue comme « grand projet présidentiel ». Des jeunes de diverses traditions et sans religion se regroupent et réalisent des initiatives de rapprochement avec ce leitmotiv : « C’est parce que nous assumons nos différences de convictions que notre action commune prend encore plus de sens. »
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