En ces jours où le Synode sur la famille se met en branle, on pourrait « regarder passer le train » sans trop s’y intéresser. Pourtant, la question posée aux pères synodaux est capitale : « Comment l’Église doit-elle se situer face aux évolutions qui affectent la famille dans les sociétés contemporaines ? » Essayez de poser cette question toute simple lors d’un souper familial. Vous aurez une grande diversité d’opinions! Il en est ainsi parmi les évêques et les cardinaux, mais ceux-ci ont un devoir de formuler une réponse qui convienne le mieux possible partout où l’Église existe. Quel défi!
Des tensions, et alors?
Il y a toujours eu des tensions dans l’Église. Celle qui rassemble les évêques concerne le pôle de la Vérité à tenir au-delà de toute dénaturation possible et celui de la Miséricorde offerte à tous les pécheurs qui se tournent vers Dieu. Les évêques ont le devoir de garder le fort de la doctrine, en communion avec le pape. En tant que successeurs des apôtres, ils ont reçu un « dépôt » qu’ils ne peuvent modifier sans craindre de s’éloigner de la Tradition et de l’Évangile.
Depuis ses tout débuts, l’Église s’est montrée déterminée à réaffirmer sans cesse ce en quoi elle croit et ce qu’il faut faire pour assurer son salut. Tous ces débats et les dogmes qui en ont résulté forment la Tradition vivante que l’Église considère comme « la Vérité ». Une foi si fortement affirmée comporte des conséquences pour la vie des ddisciples, tant au plan de la morale que de la pastorale.
Or, il y a un certain nombre de positions traditionnelles qui choquent le monde actuel. La plupart des baptisés qui vivent dans la mouvance de leur temps se sentent souvent coincés avec les positions morales concernant la contraception, le mariage, les couples de même sexe, etc. Jusqu’à présent, l’Église s’est montrée plus encline à renforcer le pôle vérité pour éviter toute confusion, laissant peut-être aux seuls pasteurs le soin de la miséricorde divine à prodiguer.
S’il est vrai que la Loi reçue de Dieu est immuable, son attitude de compassion envers les gens qui souffrent est tout aussi incontournable. Il faut donc jongler avec les deux. Les moralistes ont développé une approche à partir de la pédagogie divine dans la Bible : la loi de gradualité. Il s’agit de prendre la personne là où elle en est dans sa relation avec Dieu. De nombreux divorcés-remariés, par exemple, ne peuvent pas rompre leur nouveau lien sans causer du mal à leur conjoint actuel et souvent à leurs enfants. L’Église ne peut pas se faire complice du mal, même si c’est pour réparer une situation qu’elle juge immorale.
Le curé d’Ars vivait ainsi cette polarité : pour les habitués du confessionnal, il se montrait sévère et interpellait fortement à la croissance; pour les distants, il manifestait une telle compassion qu’il exerçait sur eux une forte attraction. Peut-être est-il temps de nous modeler sur cette approche et de considérer le prochain pas que la personne peut accomplir plutôt que l’abîme qu’elle devrait franchir pour se « mettre en règle » avec Dieu…
Comment réagissez-vous ?