Voici le seizième article de la série “En quête de foi”, publié dans l’édition de janvier-février 2014 du Messager de Saint-Antoine. L’objectif de cette série est d’explorer les éléments de la tradition chrétienne dont les traces sont toujours perceptibles dans la culture actuelle.

La parabole du Bon Samaritain (Luc 10, 27-37) est l’une des plus connues et surtout des plus emblématiques du christianisme. Il n’est pas rare encore d’entendre dire, à propos d’untel ou untel, que c’est un « bon samaritain », signifiant ainsi comment sont appréciées ou admirées sa générosité, sa compassion ou sa capacité de prendre soin.
Avec la baisse de pratique religieuse, les bons samaritains sont-ils aussi en voie de disparition? Rien n’est moins sûr. En fait, il est probable qu’en cherchant un peu nous trouvions de « nouveaux bons Samaritains » qui ont plus ou moins les mêmes caractéristiques que celui dont Jésus fait l’éloge. Redisons tout d’abord une vérité évidente : dans le récit de Jésus, ni le prêtre, ni le lévite ne se sont arrêtés pour aider l’homme pris à partie par des brigands et laissé pour mort. Le Samaritain est visiblement un marchand d’huile qui traverse le pays pour visiter ses clients. Un simple commis-voyageur, étranger, est devenu le symbole de la charité chrétienne.
Où les trouve-t-on?
À l’occasion du témoignage d’un père de famille endeuillé par la perte de sa fille de deux ans, emportée par une maladie rare, j’ai constaté de nouveau à quel point notre société regorge de bons samaritains. Après avoir parlé longuement de son expérience, notre témoin a mentionné l’aide que son épouse et lui ont reçu de la part d’un groupe de « pairs », c’est-à-dire des gens qui ont vécu plus ou moins la même épreuve. Ce groupe est affilié au mouvement international « Les amis compatissants ». Même si le diacre qui a célébré les funérailles, le curé et même l’agent de pastorale ont été plus attentifs que les passants du récit biblique, ce ne sont pas eux qui ont été les plus signifiants pour aider le couple à surmonter sa peine, mais bien ces « autres comme eux ».
Nous trouvons depuis longtemps ce principe d’entraide mutuelle par l’intégration à un groupe de pairs qui savent par expérience ce que nous vivons. Ils se font accueil, soutien, accompagnement et se lient d’amour fraternel. En tout premier, ce fut parmi les alcooliques que cette forme de soutien débuta et s’étendit ensuite à d’autres dépendances (narcotiques, « outremangeurs », jeu compulsif, sexo-dépendants, etc.). D’autres encore se sont créés sur le même principe, par exemple des réseaux d’hommes aux prises avec des situations affectives.

L’Église a tout avantage à reconnaître et honorer ces groupes qui foisonnent et qui font du bien aux êtres dont le cœur est transpercé par le malheur. Se relever d’un deuil, d’une dépendance, de situations qui écrasent, parfois jusqu’au bord de la destruction, est une expérience du même ordre que celle de la mort-résurrection. Ce passage peut, fort heureusement, être accompagné par de bons samaritains qui offrent de marcher avec d’autres « comme eux », avec le sentiment de donner au suivant…
Sans qu’il soit question de foi chrétienne dans le sens explicite, il ne peut s’exercer une telle charité envers autrui si elle n’est pas nourrie par l’amour. Et l’amour, oui cet amour-charité, ne vient-il pas d’une seule et même source?
Comment réagissez-vous ?