
Autrefois, on censurait au nom de Dieu. Mal lui en prit, car maintenant c’est Dieu lui-même qui subit la censure! En effet, ces jours-ci, à Sorel-Tracy, on censure Dieu à l’école tout comme autrefois on y censurait le sexe. Un prof de musique a beaucoup fait parler de lui en supprimant la dernière phrase de l’Hymne à l’amour d’Édith Piaf dans le cadre d’un concert qui sera donné par des jeunes de son école. Le professeur de musique « ne voulait pas avoir à répondre à des questions liées à la religion de la part de ses élèves. » (Source)
Stéphane Laporte, qui est en voie de devenir peu à peu le pourfendeur de la bêtise humaine, en particulier lorsque celle-ci s’attaque au patrimoine religieux et à nos coutumes, a écrit sur son blogue : « Le métier de professeur, ce n’est pas de faire disparaître les mots, c’est de leur donner un sens. » Et pour s’assurer que l’enseignant n’aura pas à chercher longtemps, il lui donne en mille la signification de la phrase tronquée : « Ça veut dire que l’amour est plus fort que tout. Et qu’il unit à jamais ceux qui s’aiment pour vrai. » Alors que vient faire Dieu, là-dedans? Qu’on y croit ou non, il est le symbole par excellence de l’amour. Pas si compliqué, finalement…
Le député de Richelieu, Sylvain Simard, a lui aussi réagi vivement en demandant à la commission scolaire de corriger le tir. Il a surtout soulevé la question qui est probablement la plus sensée :
Imaginez un instant l’hécatombe culturelle à laquelle il faudrait se livrer si nous avions l’idée saugrenue d’éliminer toutes les références à la religion dans les romans, les livres d’histoires, la peinture, le cinéma… »
Il y a quelques mois, une autre chanson classique, du groupe Dire Straits, avait fait elle aussi l’objet de censure, cette fois-là pour des raisons de discrimination: « La chanson Money for nothing est jugée homophobe par le Canada, qui interdit la diffusion de la version non modifiée. » (Source) Le Canada (et le Québec), pays de la liberté d’expression, serait-il sur le point de devenir le champion de la réécriture de l’histoire et des textes pour s’assurer qu’ils correspondent à une certaine vision du politiquement correct en matières de droits des minorités et de laïcité?
Nous faudra-t-il tout revisiter, tout réécrire, pour que ce qui a été légué autrefois par nos prédécesseurs soit revu afin de ne pas troubler nos consciences modernes si peu préparées à lire ou à entendre de telles choses? Imaginez tout ce travail négationniste!
« Ils nous enlèvent notre religion »
Cela m’amène à un autre aspect de la réflexion. Dans mes échanges avec les gens, j’entends régulièrement l’expression de la peur que les immigrants apportent avec eux des coutumes et des religions différentes et réclament, une fois en place, que nous rejetions nos traditions et nos références religieuses. Je trouve ça injuste, car il est beaucoup plus fréquent de voir les nouveaux arrivants se réjouir de nos habitudes culturelles, de nos symboles saisonniers, de nos monuments religieux! D’ailleurs, à ce que je sache, ce n’est pas un groupe de juifs qui a demandé le retrait de la prière au conseil municipal de Saguenay; ce n’est pas un groupe de sikhs qui a exigé le retrait des décorations de Noël des bureaux de Service Canada; ce n’est pas plus des musulmans qui ont souhaité le retrait de la crèche de Noël et de la ménorah devant l’Hôtel de Ville de Mont-Royal!
La plupart des décisions de retirer des symboles visibles de notre héritage culturel et religieux sont conséquentes à l’action de personnes bien installées au Québec depuis des générations et qui le font au nom d’une certaine idée de la laïcité. Ils procèdent davantage d’un sentiment anti-religieux que de laïcité véritable. Ceux-là disent que la religion n’a sa place que dans le domaine privé: « C’est mieux vu si ça ne se voit pas! ». D’autres affirment que nous plions mollement et que nous ne savons pas nous tenir debout pour faire respecter ce que nous sommes et ce qui nous représente. Il n’en demeure pas moins que ce n’est généralement pas suite aux initiatives des nouveaux Québécois qu’il nous faut faire le vide de tout ce qui témoigne de notre passé. Au contraire, toute cette censure, tout cet anéantissement de notre culture religieuse est plutôt le fruit d’une minorité athée radicale qui s’en prend à tous les symboles religieux et qui veille à ce qu’ils disparaissent de l’espace public…
Grâce à ces stratégies radicales et parfois agressives, nous en viendrons peu à peu à une situation de facto où plus aucune religion ne pourra s’afficher d’une quelconque manière dans l’espace public. Nous pourrions donc voir arriver un temps où il ne restera plus rien pour rappeler que nous avons été et que nous sommes encore, envers et contre tout, pour au moins 90% d’entre nous, des êtres pour lesquels la dimension de la foi et des croyances religieuses demeure une réalité essentielle à notre identité profonde. Et ainsi, privés d’une part importante de notre identité, nous déambulerons laïcisés, neutralisés, dans un espace public dépouillé de toutes les couleurs de la diversité.
Comment réagissez-vous ?